stones of power

La journée est finie, en témoigne la fatigue qui pèse sur leurs membres, les rattrapant mieux que n'ont su le faire les sorciers. Mais c'est autre chose, aussi, qui mord les membres lourds de Jamie. « Ca empire » Ce n'est pas une question alors que la pierre chauffe doucement contre son torse d'un peu de magie échappée, utilisée. Et les mots, froids d'inquiétude, tombent entre eux, roulant sur le carrelage fendillé de leur cuisine de fortune « Ca va, essaie de contrer son frère avant de se raviser avec plus de douceur - plus de fatigue : juste besoin de dormir. » Le regard qui le fixe est froid. « Il nous aurait apporté ce dont tu as réellement besoin » Il. Le sorcier de l'Automne. Le chasseur dompté, asservi d'une pensée traitresse, maîtresse : protège-moi. Il les avait protégé, il les aurait encore protégé sans l'intervention de James. Et Isidore ne peut s'empêcher de lui en vouloir, il ne peut s'empêcher de s'en vouloir de s'être laissé convaincre - le sorcier brainwashé aurait été la solution à leurs problèmes actuels. « Tu sais bien que non. » Balaie James du revers de la main en se laissant tomber dans une chaise branlante, et il n'en faut pas plus pour que le red thief se saisisse d'un verre, le remplisse d'eau et le claque contre la table avec une fiole de potion. « Quoi ? glisse-t-il, un sarcasme froid et mordant au coin de la gueule : Tu n'as pas besoin de survivre ? » Et ça le démange. L'envie le démange si fort que les doigts s'enroulent sur eux-mêmes, s'enfoncent dans la poche fatiguée d'un pantalon trop usé. Ca le démange si fort que son frère sait ce qui se trame dans sa caboche, le percute d'une violente pensée de rejet. « Si tu fais ça ... » le prévient-il, posant des mots sur la claque mentale qu'il vient de lui coller. Et Isidore grogne, mécontent. De la lucidité de son frère. De sa propre faiblesse, de son manque de résolution. Putain, est-ce qu'il ne veut pas assez la survie de James pour lui transmettre sa volonté ? Pour le contaminer ? « Pas comme ça, refuse James, avalant la potion à la qualité douteuse et au prix exhorbitant, avant de poser une main sur son épaule, se relevant : Ca n'en vaut pas la peine comme ça, Isi » Pour aller s'effondrer dans le matelas défoncé où dort déjà Judith, dans leur unique chambre.

Putain, qu'est-ce qui vaut plus la peine que ça, la survie de James et Judith ?
Rien. Il a déjà tout donné pour eux et donnerait plus encore, sans sourciller, sans plier.

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« Isidore ! » L'appel le fait sursauter, tue les pensées noires, parasites, qui tournent et s'agitent dans la cervelle gangrénée. Un instant, Isidore craint que ce ne soit Judith qui l'appelle, que les pensées ne se concrétisent dans la pire issue possible. Il a la main sur la rambarde de l'escalier lorsque les bruits de la porte le ramènent en arrière. « Isidore, ouvre-moi ! Il faut qu’on parle. » Il réalise que c'est un autre qui l'appelle - son autre frère en quelque sorte, le reflet dont les contours se confondent parfois avec les siens. « Allez, ouvre Isi, j'ai besoin de toi... » Et il s'alarme au son de la voix, aux accents graves, éraillés. Les doigts s'enroulent autour de la poignée, la faisant pivoter, et c'est dans ses bras qu'il récupère un Judas vacillant. « Qu'est-ce que- » s'étonne-t-il, d'abord, l'aplomb, la distance se fendillant un instant, laissant transparaître l'inquiétude devant le visage tuméfié de Judas et l'odeur de sang séché qui envahit son nez. Puis immédiatement, le masque se reforme, les rouages calculent déjà les meilleurs mouvements pour venger son ami alors que le soutenant d'un bras, il l'entraîne à l'intérieur, là où les faiblesses peuvent se cacher, où tout peut se dévoiler. Et l'installe sur le canapé défoncé.

Mécaniquement, l'opale tend sa magie vers la psyché de Judas, n'y trouve qu'un amas brouillé, indémêlable de colère et d'écoeurement. « Qu'est-ce qui t'es arrivé ? » demande-t-il, tirant lentement sur la veste pour l'en débarasser, révelant l'ampleur des dégats. « Qui t'a fait ça ? » Ce quelqu'un est mort, flotte entre les mots, s'enlace à la voix neutre, posée, pendant qu'il lui présente une potion anti-douleur volée à l'hôpital dawn.